Philippe Braquenier au Centre Bang
Dans le cadre d'un partenariat entre le BPS22 et le CALQ (Conseil des Arts et des Lettres du Québec), l'artiste belge Philippe Braquenier était en résidence, pendant cet automne 2018, au Centre d'art actuel Bang, à Saguenay (Québec). L'occasion, pour l'artiste, de focaliser son énergie sur la production d'un projet documentaire consacré aux Flat-Earthers, une communauté de personnes persuadées que la terre est plate.
Pendant plus d'un an avant la période de la résidence, Philippe Braquenier avait déjà mené un travail de recherche et de réflexion sur ce sujet des Flat-Earthers. Sur place, l'équipe du Centre Bang a pu l'aider à chaque étape de production du projet Earth not a globe: repérage de lieux, matériel technique, recherche d'accessoires, etc.
En tant que photographe utilisant un style documentaire à la chambre photographique, l'artiste insinue implicitement avoir réalisé un travail documentaire véridique sur cette communauté alors que tout a été mis en scène. Chaque image puise son inspiration de leur mythologie et représente une scène réelle ou un photomontage partagé. A travers ces corpus d'images, le but de Philippe Braquenier est de questionner le rôle de la photographie dans une ère de faits alternatifs. En brouillant la frontière entre la vérité et l'affabulation, il nous montre que les faits sont purement subjectifs, que la vérité est devenue une notion suspecte, que la réalité n'est qu'une construction sociale et que les humains sont intrinsèquement biaisés.
EARTH NOT A GLOBE par Philippe Braquenier
Les continents flottent sur une interminable étendue d'eau et recouvrent, d'une certaine façon, une couche de roches et de feu. La Terre est un disque sous un dôme de verre et les terres que nous connaissons sont entourées par une nature sauvage et infinie, faite de glace et de neige au-delà de l'océan Antarctique, bordées par une falaise de glace circulaire de plus de 15 mètres de haut. Ce que nous appelons le pôle Nord est au centre de la terre. Le soleil et la lune sont de géantes sphères qui se déplacent en cercles au-dessus de la Terre. Comme des projecteurs, ces sphères célestes illuminent différentes parties de la planète en un cycle de 24 heures et nous permettent de voir le firmament pendant la nuit. Les dispositifs GPS sont configurés de manière à faire croire aux pilotes d'avion qu'ils volent en lignes droites autour d'une sphère alors qu'en réalité, ils tournent en rond.
Earth not a globe est un projet documentant les Flat-Earthers, une communauté de personnes croyant que la Terre est plate. En se promenant sur la surface de la planète, elle nous semble plane et interminable. Tellement, que les platistes ne croient que ce qu'ils voient pour discerner la vraie nature du monde qui les entoure et, d'une autre manière, ne voient que ce qu'ils croient. Ils nous disent que l'on ne peut faire confiance à nos yeux mais ne font référence qu'à des approches empiriques. Ils créent des photomontages et des vidéos comme armes de propagande tout en rejetant les images du globe terrestre, les décrivant comme des fabrications d'un "complot pour la Terre ronde" orchestré par la NASA et d'autres agences gouvernementales.
Le titre du projet tire son origine de livres écrits par Samuel Birley Rowbotham au 19ème siècle. La conjecture de la "Terre plate" s'est largement développée à l'ère moderne grâce à la prolifération des technologies de communication qui ont donné à ces personnes une plateforme pour diffuser ces idées pseudo-scientifiques et la possibilité de créer une communauté de croyants. La conviction d'une Terre plate a été décrite comme l'ultime théorie du complot. Les théories du complot sont attrayantes car elles offrent une explication simple à des phénomènes complexes ou parce qu'elles laissent croire aux gens qu'ils connaissent un secret que les puissants souhaitent effacer. Ils deviennent des prophètes qui connaissent une information que le reste du monde est trop aveugle pour voir.